mercredi 5 avril 2006

Le futur du positionnement sur Internet : rebondir !

Le futur du positionnement sur Internet : rebondir (vite) !

Billet qui fait pendant au précédent, dicté par l'actualité d'hier.

J'ai déjà eu l'occasion de parler du cas Silvio Berlusconi, premier ministre indigne d'un pays civilisé, encore à propos d'un de ses habituels écarts de langage. Mais enfin, on peut pas toujours être derrière, vu qu'il en fait tous les jours, volontairement ou involontairement. Il y a pourtant des fois où il exagère vraiment, l'exemple le plus connu étant sa fameuse tirade au Parlement européen, en juillet 2003, lorsqu'en plein hémicycle il traita de « Kapo » un Eurodéputé allemand, Martin Schulz.

Il y a quelques jours, il a presque créé une crise diplomatique avec Pékin, après avoir affirmé que les « communistes chinois faisaient bouillir les enfants »...

Hier en revanche, alors qu'il s'adressait aux électeurs italiens, à moins d'une semaine de l'élection de dimanche prochain, il eut cette phrase charmante :
« Ho troppa stima per l'intelligenza degli italiani per poter credere che siano in giro così tanti coglioni che possano votare contro i propri interessi »
Avant de se reprendre, gauchement et en butant sur les mots : « Scusate è un linguaggio rozzo ma efficace... » !

Le peuple remercie pour l'estime...

La presse internationale s'est bien sûr emparée de l'affaire, voir ici le Guardian :
« I have too much respect for the Italians to think there are that many dickheads around who'd vote against their own interests. »
Quant à moi, je me suis intéressé à la traduction française, ici ou , reprise de la dépêche de Reuters.

La traduction proposée est la suivante :
« J'ai trop d'estime pour l'intelligence des Italiens pour penser qu'ils puissent être couillons au point de voter contre leurs propres intérêts », a-t-il dit. « Pardonnez-moi mon langage abrupt certes, mais efficace. »
Le point de traduction que je souhaite soulever concerne le terme « coglioni », rendu par « couillons » dans la presse française, qui est une traduction exacte mais littérale, et ne prend nullement en compte ce qu'on appelle « le registre de la langue ».

La connotation anatomique de « coglioni » (couilles) explique l'étymologie de « couillons », mais si l'on veut conserver le ton, il faudrait traduire par « cons », ou mieux encore, « connards ».

Transposé à notre situation politique franco-française, imaginez le scénario suivant, où une semaine avant les élections présidentielles, Villepin s'adresserait à l'électorat hexagonal en déclarant fièrement :
« J'ai trop d'estime pour l'intelligence des français pour penser qu'ils puissent être cons au point de voter contre leurs propres intérêts »...
* * *

Maintenant, pour en revenir au sujet de ce billet, je voudrais vous citer l'exemple de M. POL, qui a ouvert dans la foulée un blog sobrement intitulé « Je suis un con » (sonouncoglione), qui a reçu plus de 3 000 commentaires dès le jour de son ouverture (MàJ - 1-10-08 : ça continue et nous en sommes à plus du double aujourd'hui). Ou encore cet autre exemple, avec la vidéo en prime et plus de 2 000 commentaires. Qui dit mieux ?

Comme toujours, une mention spéciale au blog de Beppe Grillo, avec son billet intitulé Déchaîne-toi, connard !.

Scatenati, coglione!
Voilà donc un exemple éclatant de la façon dont une veille attentive peut et doit s'exercer, autant a priori (anticiper) qu'a posteriori (rebondir).

Jean-Marie Le Ray


P.S. Pour une fois je suis d'accord avec Antonio di Pietro : « meglio coglioni che Berlusconi » (mieux vaut être un con que Berlusconi), avec toutes nos excuses aux cons pour la comparaison, ajouterai-je...

Ça me rappelle une petite phrase d'un comique transalpin, Paolo Rossi, qui dit à peu près ceci : « Pour autant que Berlusconi mette des talons hauts, il ne sera jamais à la hauteur de la situation » -:)

Berlusconi est une honte pour le peuple italien en particulier, et pour le genre humain en général, c'est mon avis et je le partage...

Si quelqu'un souhaite approfondir l'argument (en italien) :



[MàJ - dans l'après-midi (05-04-06)] Toujours dans le chapitre REBONDIR, les premiers t-shirts sont déjà disponibles :



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dimanche 22 janvier 2006

La connaissance inutile

La connaissance inutile

Le titre de ce billet est emprunté à un essai homographe de Jean-François Revel, paru chez Grasset en 1988.

Je cite la quatrième de couverture pour cadrer mon propos :

« Nous vivons et allons vivre toujours plus dans l'ère de l'information, répète-t-on chaque jour. Il est vrai. Jamais autant d'hommes n'ont eu accès à une telle masse d'informations et, plus généralement, de connaissances. Jamais la communication n'a été aussi abondante, aussi rapide, aussi présente partout. Jamais donc, en théorie, les décideurs politiques, économique, sociaux, culturels n'ont travaillé dans de meilleures conditions, depuis les origines de l'humanité. Les opinions publiques disposent de tous les éléments nécessaires pour bien juger les dirigeants et pour s'orienter. Le monde devrait, par conséquent, ne s'être jamais mieux porté qu'aujourd'hui. Or chacun sait qu'à bien des égards il n'en est rien. Pourquoi ? »

- Oui, pourquoi ? !

La connaissance inutile
- Et pourquoi avoir pensé à ce livre quelque 18 ans après l'avoir lu ?

- Parce que j'ai entendu cette semaine, prononcée par Silvio Berlusconi, Président du Conseil des Ministres italien (sorte d'équivalent du Premier Ministre en France), la phrase suivante :

« Le Président du Conseil, par définition, ne peut pas mentir » !!!

Ça fait des jours que je mâche et remâche ces mots en moi, que je me demande quoi en faire ? Étant moi-même traducteur par métier et poète par passion, j'attache une importance viscérale au choix des mots, à leur poids, ou, pour mieux dire, en paraphrasant un fameux slogan, « au choix des mots, au poids du sens ».

Valery Larbaud me revient à l'esprit, dans Sous l'invocation de Saint-Jérôme, qui disait des traducteurs : (chacun de nous a) « près de soi, sur sa table ou son bureau, un jeu d'invisibles, d'intellectuelles balances aux plateaux d'argent, au fléau d'or, à l'arbre de platine, à l'aiguille de diamant, capables de marquer des écarts de fractions de milligrammes, capables de peser les impondérables » !

Donc, pour en revenir à mon sujet, j'ai repensé à l'ouvrage de Revel parce que, dès l'instant où je l'ai lue, la phrase qui ouvre le livre s'est imprimée en moi de façon indélébile : « La première de toutes les forces qui mènent le monde est le mensonge. »

Oui, voilà l'association qu'ont suscitée en moi les mots de Berlusconi : « Le Président du Conseil, par définition, ne peut pas mentir » = « La première de toutes les forces qui mènent le monde est le mensonge. »

D'où l'inférence, évidente : « La première de toutes les forces qui mènent l'Italie est le mensonge. »

J'aurais beaucoup d'autres choses à dire sur ces mots, sur la démagogie populiste et sur l'irresponsabilité du « bon peuple », or je me limiterai à une citation de mon cru, inspirée d'une phrase dont j'ai oublié l'auteur, mais qui remonte à la Révolution, et plus exactement à la Terreur (si mes souvenirs sont bons, car je cite de mémoire) : « Quand un peuple peut être terrorisé, il l'est ! »

Qui nous donne, appliquée à la réalité d'aujourd'hui :

« Quand un peuple peut être mené en bateau, il l'est ! »




« ... la véritable autonomie que l’homme démocratique peut conquérir, c’est celle qui consiste à comprendre que c’est lui qui, grâce à la liberté et à l’exactitude de l’information, fait l’histoire. » JEAN-FRANÇOIS REVEL


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