[MàJ - 14 octobre 2009] Le PAPELLO a enfin été remis aux juges (premières photos !), un moment HISTORIQUE pour l'Italie, on en reparlera...
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Ça y est : papounet est complètement à la masse ! Depuis qu'hier la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnelle la loi qu'il s'était fait écrire sur mesure par ses avocats pour lui garantir l'immunité - et l'impunité - au prétexte qu'il serait au-dessus de ses concitoyens en vertu de son rôle (oui, je sais, la phrase est tordue, mais c'est son influence qui déteint), il a les neurones qui ont pété.
Non pas à cause des procès dont on sait qu'il s'en tirera très probablement par quelques pirouettes légales en payant quelques millions de plus à ses avocats (eux au moins, ils ont trouvé la poule aux œufs d'or, et ça repart aujourd'hui même...), mais plutôt à cause des affaires de mafia qui sont sur le point de le rattraper d'un instant à l'autre. Et dans le cadre desquelles il y a tellement d'éléments à charge contre lui, son éminence noire, Marcello Dell'Utri, et le parti politique qu'ils ont créé ensemble, Forza Italia, qu'on voit mal comment cette fois il pourrait s'en sortir sans dégâts.
J'ai vu hier soir une émission culte en Italie, AnnoZero, dont le thème était les vérités cachées sur le pacte de sang passé entre l'état italien et la mafia autour de l'assassinat des juges Falcone & Borsellino et des attentats meurtriers de 1993.
Autant de carnages sur lesquels a été bâtie la "deuxième république italienne" que nous avons sous les yeux aujourd'hui. Or l'un des points cruciaux pour arriver à la vérité était d'établir avec certitude à quelle époque ont commencé les négociations. Selon l'ex-général Mori lui-même (celui qui a capturé Riina sur dénonciation de Provenzano dans le cadre de ces négociations) (actuellement chargé de la sécurité de ... Rome ! et de la future expo universelle de Milan 2015...), les pourparlers avec l'intermédiaire autorisé par Cosa Nostra, Vito Ciancimino, auraient débuté avec précision le 5 août 1992, c'est-à-dire APRÈS l'assassinat de Borsellino. Et, toujours selon Mori, ces pourparlers auraient été entrepris à "son" initiative comme conséquence des assassinats de Falcone & Borsellino.
Une version contestée depuis toujours par nombre de personnes, et notamment par la famille du juge Paolo Borsellino, selon qui la décision de tuer Borsellino aurait été accélérée parce qu'il aurait été mis au courant des négociations en cours et qu'il s'y serait opposé de toutes ses forces. Selon une chronologie que Paolo aurait consigné précisément dans l'agenda rouge dont il ne se séparait jamais et que ses assassins ont fait disparaître.
Un agenda rouge devenu aujourd'hui le double symbole de la justice niée d'une part - du côté de l'État -, et de la soif de justice et de vérité de l'autre - du côté des gens honnêtes.
Donc, le scoop énorme que nous ont réservé hier soir Michele Santoro et Sandro Ruotolo (qui viennent d'être menacés de mort, voir en fin de billet), c'est que Paolo Borsellino a très sûrement été mis au courant des négociations autour du 20 juin 1992, soit environ un mois après la mort de son ami Giovanni Falcone et un mois avant sa propre mort.
Circonstance confirmée par Claudio Martelli, ministre de la Justice de l'époque, et par la secrétaire du juge Falcone, qui était également amie de Paolo Borsellino. Le scoop fait d'ailleurs la Une du nouveau quotidien, Il Fatto, sur lequel je reviendrai un jour...
Circonstance confirmée également par Massimo Ciancimino, un des fils de Don Vito, qui était sur le plateau hier soir, et qui a répété (ou pour le moins qui n'a pas nié) que son père avait été supplanté ensuite dans son rôle d'intermédiaire par Marcello Dell'Utri.
Celui qui deviendra le véritable ambassadeur de la mafia, le "référent" comme l'appelle il y a deux jours encore un repenti de premier plan, Antonino Giuffré, qui précise que le nouveau parti appuyé par la mafia était Forza Italia, après le déclin total de la Démocratie Chrétienne et du Parti Socialiste :
« Forza Italia e Dell’Utri referenti di Cosa Nostra.Des négociations qui ont provoqué des dizaines de morts et une série d'attentats, et dont un autre repenti, Gaspare Spatuzza, dit à propos du dernier, qui aurait dû être le plus meurtrier, qu'ils avaient reçu la "couverture politique" de leur "pays" (Dell'Utri) :
Quando Dc e Psi si avviarono al tramonto, in Cosa nostra nacque un nuovo discorso politico. Un nuovo soggetto politico andava appoggiato: era Forza Italia ».
Giuseppe Graviano mi disse che per quell'attentato avevamo la copertura politica del nostro compaesano.À propos de cet attentat, perpétré fin 1993 près du stade Olympique de Rome, je signale qu'il aurait causé un véritable carnage : une voiture piégée devait exploser au passage d'un bus rempli de policiers chargés d'assurer le service d'ordre au match de foot de l'A.S. Roma, et seul un détonateur défectueux a empêché la tuerie. Tout le déroulement de l'attentat a été reconstitué dans des centaines de pages déposées aux actes des procès pour les massacres de 1993.
Je vous laisse imaginer l'impact dévastateur qu'aurait eu un tel acte criminel dans une Italie déjà dévastée par la situation politique d'alors. Un attentat qui n'a pas été répliqué uniquement parce qu'entre-temps la mafia et ses interlocuteurs sont parvenus à un accord définitif. Qui a duré jusqu'à aujourd'hui mais qui est en passe de prendre fin, incessamment sous peu.
Donc faut-il s'attendre à une nouvelle saison de bombes et de meurtres comme à la grande époque de la stratégie de la tension ? Personnellement, je ne pense pas pour une série de raisons, mais les menaces de mort adressées ces jours-ci à Sandro Ruotolo et Michele Santoro (c'est mon avis : la lettre de menace dit à Sandro Ruotolo qu'il est le deuxième objectif sur la liste, or il est le second de Michele Santoro, lui-même menacé la saison dernière) ne laissent rien augurer de bon.
Et malheureusement, tant que l'Italie ne réussira pas à faire toute la lumière sur les véritables circonstances à l'origine de sa deuxième république, dont le personnage central est Silvio Berlusconi, ce pays restera une non-démocratie sans avenir.
Mais je reste optimiste, je dois au moins ça à mon fils.
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P.S. Pendant l'émission, la femme de Paolo Borsellino a lancé un appel à la vérité. C'est la première fois qu'elle s'exprime publiquement depuis 17 ans...
Actualités, Italie, Papello, Silvio Berlusconi, démocratie, information, mensonge, vérité, politique, société, mafia, manipulation
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