lundi 18 janvier 2010

Italie : censure sur le Web


[MàJ - 25 janvier 2010] J'ai vu dans mes liens référents que ce billet est cité sur Numérama, où l'un des commentateurs dit ceci :
Je ne suis pas complètement d'accord avec l'analyse de Jean-Marie Le Ray sur son blog. Oui, la directive européenne exclut "les activités dont la vocation première n'est pas économique et qui ne sont pas en concurrence avec la radiodiffusion télévisuelle, comme les sites web privés et les services qui consistent à fournir ou à diffuser du contenu audiovisuel créé par des utilisateurs privés à des fins de partage et d'échange au sein de communautés d'intérêt."

Mais dans ce genre de texte, chaque mot et chaque virgule a un sens.



(...)



Entendons-nous bien : je pense qu'il s'agit d'un décret pour que Berlusconi protège son empire audiovisuel, en plus qui aurait mérité de passer par une loi (quoique je ne connaisse pas bien le système législatif italien). Mais quand on combat quelqu'un, il ne faut pas se tromper d'argument, sinon on en prend plein la gueule. Et à mon avis, se battre contre le fait que c'est contraire à la directive européenne, c'est une erreur car il est facile de contre-argumenter.
Je précise donc que mon billet reprend surtout l'analyse dominante faite en Italie, qui est à l'origine d'une contestation officielle de l'opposition devant le Conseil d'État.



En outre, des voix contraires se sont élevées au sein même du parti de Berlusconi (PDL), notamment celle de Luca Barbareschi, et toutes ces protestations conjointes semblent porter leurs fruits puisque l'avis des Commissions parlementaires a été repoussé et la majorité laisse entendre que des amendements pourraient être apportés au texte du décret.



(j'ai essayé de répondre directement sur Numérama, où je me suis inscrit pour publier, mais mon commentaire n'a pas été accepté, j'ignore pourquoi)



* * *


Je vous ai déjà entretenu des risques imminents de censure berlusconienne sur Internet, voici maintenant le dernier épisode en date : l'adoption du "décret Romani", du nom de l'actuel secrétaire d'État en charge des communications, Paolo Romani, ex patron de télévision ayant produit des émissions cultes telles que Colpo grosso...



En fait, l'affaire est un peu plus compliquée qu'il n'y paraît, car ce fameux décret ne concerne pas que la censure des web-télévisions, elle met également des bâtons dans les roues à Sky (la télé de Murdoch étant le seul concurrent sérieux de Berlusconi en Italie) et augmente le seuil d'annonces publicitaires essentiellement au profit des télés de ... Berlusconi, en doutiez-vous ?



Mais je me limiterai ici aux répercussions possibles sur Internet, un aspect fortement contesté par l'opposition qui a porté l'affaire devant le Conseil d'État, en accusant le gouvernement de "délégation excessive de compétences".



Voyons pourquoi. Ce décret, censé transposer la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA), ne tient pas compte de l'article 16, qui dit ceci :
Aux fins de la présente directive, la définition du service de médias audiovisuels devrait couvrir exclusivement les services de médias audiovisuels, que ce soit de la radiodiffusion télévisuelle ou à la demande, qui sont des médias de masse, c’est-à-dire qui sont destinés à être reçus par une part importante de la population et qui sont susceptibles d’avoir sur elle un impact manifeste. Son champ d’application ne devrait couvrir que les services tels que définis par le traité, et donc englober toutes les formes d’activité économique, y compris l’activité économique des entreprises de service public, mais exclure les activités dont la vocation première n’est pas économique et qui ne sont pas en concurrence avec la radiodiffusion télévisuelle, comme les sites web privés et les services qui consistent à fournir ou à diffuser du contenu audiovisuel créé par des utilisateurs privés à des fins de partage et d’échange au sein de communautés d’intérêt.
Or que fait Berlusconi ? Au lieu de les exclure, il les inclut !



Et plus précisément à l'article 4, premier alinéa, lettre a) du décret :
Dans le cadre du présent texte unique, on entend par :

a} services de médias audiovisuels : ... les services, y compris diffusés via Internet, qui impliquent la fourniture ou la mise à disposition d'images animées, sonores ou non, pour lesquels le contenu audiovisuel n'a pas un caractère purement secondaire.
En fait, le décret assimile la télévision IP à la télé tout court !



Un bon raccourci pour appliquer aux web télévisions la législation applicable aux télés traditionnelles, parfaitement contraire à l’esprit de la directive...



Par conséquent si ces web tv, qui disposent de moyens limités, sont désormais obligées d'obtenir des autorisations gouvernementales pour diffuser, on voit mal comment elles pourront subsister.



Et qu'en sera-t-il pour l'internaute lambda qui diffusera sur son site un extrait de Youtube ou autre ? Selon Google, les violations seraient passibles d'amendes pouvant aller jusqu'à 150 000 euros...



Ça me semble extrêmement raisonnable !





Merci à Maxime :-)





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P.S. Un peu hors sujet, mais je signale à celles et ceux qui ont suivi sur mon blog l'agression à Berlusconi, que le parquet de Milan vient d'ordonner une expertise médicale sur le patient pour en savoir un peu plus sur la véritable nature de ses blessures...



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